Cour de cassation, chambre sociale, 28 novembre 2018, n°17-20.079:
Par cet arrêt, la Cour de cassation statue pour la première fois sur la qualification du contrat liant un livreur à une plate-forme numérique.
En effet, par la loi du 8 août 2016, le législateur ne s’est pas prononcé sur le statut juridique de ces livreurs et n’a pas édicté à leur égard de présomption de non-salariat.
Dans cette affaire, la société Take eat easy utilisait une plate-forme numérique et une application pour mettre en relation des restaurateurs partenaires, des clients passant commande de repas par le biais de la plate-forme et des livreurs à vélo exerçant leur activité sous un statut d’indépendant.
Un livreur avait saisi le conseil de prud’hommes d’une demande de requalification de son contrat de prestation de services en contrat de travail. Le conseil de prud’hommes puis la Cour d’appel ont rejeté cette demande. Le livreur s’est alors pourvu en cassation.
Il appartenait à la Cour de cassation de déterminer s’il existait un lien de subordination unissant un livreur à la plate-forme numérique.
Selon la jurisprudence de la chambre sociale, le salarié est celui qui accomplit un travail sous un lien de subordination, celui-ci étant caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur, qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné (Soc., 13 novembre 1996, n°94-13.187).
L’existence d’une relation de travail salarié ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination qu’elles ont donnée à la convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l’activité professionnelle (Soc., 17 avril 1991, pourvoi n°88-40.121).
En l’espèce, la Cour de cassation relève que l’application était dotée d’un système de géo-localisation permettant le suivi en temps réel par la société de la position du coursier et la comptabilisation du nombre total de kilomètres parcourus, de sorte que le rôle de la plate-forme ne se limitait pas à la mise en relation du restaurateur, du client et du coursier.
La société disposait également d’un pouvoir de sanction à l’égard du coursier.
En conséquence, il existait un pouvoir de direction et de contrôle de l’exécution de la prestation du livreur caractérisant un lien de subordination.
Les juges du fond ne pouvaient écarter la qualification de contrat de travail.
En définitive, la Cour de cassation juge donc que le livreur était titulaire d’un contrat de travail.
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